Le style rockabilly : histoire, tips et pièces incontournables
« Wop bop a loo bop a lop bom bom », neuf mots comme pour démarrer un moteur prêt à s’emballer et remettre une pièce dans le grand jukebox de l’histoire. On est en 1955, un homme noir, Little Richard, 23 ans, vient embraser la scène rock naissante. Il joue du piano debout, chante comme il crie et affiche une dégaine qui interpelle. Coiffure pompadour laquée et fine moustache, les yeux maquillés, le petit Richard a une certaine élégance sur scène. Il est surtout l’un des premiers rockeurs de l’histoire et il en restera l’une des icônes. Son style est à l’avant-garde de ce que l’on appellera par la suite le « rockabilly » popularisé par l’avènement d’Elvis Presley. Le King de Memphis, lui aussi chante « Wop bop a loo bop a lop bom bom », quelques années plus tard. Derrière lui, toute une génération de jeunes hommes et femmes prêts à casser les codes traditionnels de leurs parents, le look rock comme étendard de leur liberté. Retour sur cette période rebelle et ses déclinaisons actuelles.
Sommaire :
1. Histoire du rockabilly
2. Les pièces phares du rockabilly
1. Histoire du rockabilly
Le rockabilly puise ses racines dans les débuts de la musique Rock’n’Roll. Ce brouhaha sur lequel les jeunes dansent plutôt que d’aider leurs parents aux besognes quotidiennes. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les adolescents ont soif de liberté. Ils ont grandi dans un monde violent, parfois avec la mort de proches partis au front. Leur vie ne sera pas celle de leurs parents. Ils sont moins dociles, veulent choisir leur destinée ou tout du moins essayent de le faire et ils profitent déjà de l’embellie économique qui pointe le bout de son nez. Ce sont les débuts du prêt à porter de masse, des « malls » consuméristes où se presse la bourgeoisie américaine blanche des banlieues. C’est aussi le début d’une certaine uniformisation des styles.
Dans cette Amérique en plein essor, naît le rockabilly. Contraction de « rock » et de « hillbilly » signifiant « campagnard ». Ça n’a rien de très valorisant. Le hillbilly, c’est le type de la montagne, un redneck, disons-le, carrément un pèquenaud ! Sauf qu’en 1954, un pèquenaud va faire passer tous les autres pèquenauds pour des super pèquenauds. Elvis Aaron Presley apparaît les cheveux gominés, les rouflaquettes saillantes, le col de la veste relevé et fait résonner « That’s all right Mama » dans toutes les radios du pays. Entre country et blues, plus direct que le rock, aussi entraînant que le swing, le rockabilly se répand comme une traînée de poudre ! C’est désormais une musique mais aussi un style et une attitude que le King de Memphis incarne comme personne.
Le style rockabilly conquiert rapidement l’Amérique, tout du moins une certaine Amérique. Pas forcément celle qui fréquente les universités de la Ivy League mais plutôt celle du prolétariat. En opposition aux varsity jacket des étudiants brillants, on retrouve les cuirs noirs sur les épaules des jeunes rebelles. Ils se laissent pousser la banane, portent des jeans, des bottes en cuir et boivent des bières assis sur l’immense capot de leur muscle car. Un homme va, en quelques mois, devenir un guide pour cette génération : c’est James Dean. Dans « La fureur de vivre » ou « Rebel without a cause » en anglais, il est l’exemple même de ces jeunes. Un peu délinquants, un peu fous, ils créent leurs propres codes et leurs propres règles plutôt que de respecter celles du monde établi. D’autres incarnent également cette mouvance comme Tony Curtis ou Marlon Brando.
La recette est simple : t-shirt blanc, blouson en cuir, regard malicieux et cigarette à la bouche. Le rockabilly est un pied-de-nez à l’autorité et une ode à la liberté. Le photographe Bruce Davidson en immortalise une bande en 1959. En résulte l’incroyable reportage « Brooklyn Gang » dans lequel il suit les « Jokers », des rockers new-yorkais en quête d’adrénaline.
Le style perdure et ne tombe jamais réellement dans l’oubli. Il trouve une continuité chez les crooners et les chanteurs de country comme Ricky Nelson ou Johnny Cash. Il s’exporte en France grâce aux yéyés, ces chanteurs qui – Johnny Hallyday en premier – traduisent les hits américains pour en faire des tubes français. Dans les années 1980, des jeunes français nostalgiques de l’époque de leurs parents font également revivre le rockabilly. Gil Rigoulet, un photographe normand les a immortalisés à Évreux, pour preuve de leur existence.
Un autre photographe, Gilles Elie Cohen, en 1982, publie une série en compagnie des « Vikings », une bande de jeunes loubards du 19ème arrondissement engagés dans la lutte contre les discriminations raciales aux côtés des « Panthers ». Eux s’identifient au rock’n’roll d’origine, notamment celui de Little Richard. Considérés comme les ancêtres des antifas, ils ont contribué à l’apparence et au style de cette gauche radicale. C’est aujourd’hui la sous-culture qui se rapproche le plus du rockabilly, peut-être avec celle des motards.
2. Les pièces phares du rockabilly
La coupe de cheveux
Si vous n’avez peur de rien, la pompadour et la banane sont faites pour vous. Quand on s’appelle Alex Turner, c’est assez facile à assumer en 2022. Pour les autres, une inspiration plus contemporaine sera la raie sur le côté. Avec un peu de cire brillante (la gomina abîme les cheveux et c’est une vraie tannée à enlever), on y croirait presque !
Les tatouages
Entre tatouages de prison et tatouages marins, les adeptes du rockabilly avaient pour habitude de se faire tatouer un peu tout et n’importe quoi. Mais essentiellement des pin-up quand même ! Encore une fois, c’est très clivant et se faire tatouer ne fait pas de vous un digne représentant d’un style. En revanche, votre attitude le fera.
Les vestes et blousons
Comme écrit un peu plus haut, le blouson était une manière de se démarquer des WASP (les protestants anglo-saxons blancs) pour revendiquer une forme de rébellion. Dans les grandes universités, c’est le Teddy qui fait loi. Dans le rock on porte des vestes en cuir noir. On récupère également le Perfecto des motards, dont la culture est assez proche du rockabilly. Autre possibilité, le manteau type Harrington. James Dean porte un modèle dans ce style sur le tournage de « La fureur de vivre ». Marlon Brando l’adopte quelques années plus tard.
Les hauts
Les deux grandes figures du cinéma dont je viens de parler ont aussi intronisé le t-shirt blanc au rang d’indispensable du vestiaire masculin et du rockabilly. Pas de chichi, on va droit au but, comme cette musique qui résonne dans le poste de la Mustang. Également très en vogue à l’époque : la chemise bowling. Elle possède un col à revers et se porte souvent au-dessus d’un marcel.
Les pantalons
Si l’on vise le pur style rockabilly, le jean est roi. C’est la période faste pour les jeaners américains qui font sortir leur produit du monde ouvrier pour habiller toute l’Amérique. C’est une récupération politique des jeunes de l’époque qui veulent encore une fois s’opposer à la bourgeoisie en revendiquant cet héritage prolétaire. Elvis Presley est une exception dans le domaine. Il a (presque) toujours évité le denim qui lui rappelait trop son enfance où l’argent manquait cruellement. Il a porté toutes sortes de tenues par la suite, mais dans sa jeunesse, il portait essentiellement des pantalons de costume.
Les chaussures
Les boots, les ‘tiags, les Desert boots ou les mocassins, il faut choisir ! James Dean portait des Santiags ou des Desert boots la plupart du temps, tandis que Marlon Brando ou Elvis étaient des aficionados du mocassin, voire même du Penny loafer. Les sneakers arriveront un peu plus tard mais une paire de Jack Purcell ou de Converse noires ne jurerait pas avec la tenue, c’est promis !
Un mot pour terminer cet article. Si l’histoire de la mode et ce qui nous en revient est absolument passionnant, je dirais qu’il faut toujours garder à l’esprit qu’elle fait partie d’un contexte politique, économique, social et culturel. La reproduire en cochant toutes les cases d’une panoplie ne donne jamais l’effet escompté. Comme pour tous les styles, le rockabilly, c’est certainement plus une affaire de rébellion et de lutte des classes que de gomina dans les cheveux !
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