L’histoire du jean
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, le denim est une toile qui tire ses origines du continent européen et non nord américain (il s’agit d’une toile française résistante qui était confectionnée à partir de laine et de soie provenant de la célèbre ville de Nîmes). Attention cependant, il serait plus juste de nuancer, car c’est bien aux États-Unis que le denim va faire son petit bout de chemin ! Plus qu’une simple matière, le denim est une toile quasiment vivante inspirant la jeunesse, la liberté, la rébellion et possédant une histoire qui lui est propre. Cette histoire est indissociable de celle des États-Unis. Pourquoi ? Tout simplement parcequ’en même temps que le pays était en train de s’affirmer comme une véritable superpuissance mondiale, ses jeans s’exportèrent comme soutient d’une nouvelle ère mondiale. Des mineurs aux agriculteurs en passant par les cow-boys et les icônes du cinéma, le 5 poches n’a pas terminé de nous surprendre ! Prenez place au fond de votre canapé, préparer un bon café (de spécialité si possible), et préparez vous à remonter le temps avec nous à la découverte de l’histoire du jean !
Sommaire :
1. Strauss & Davis : la naissance d’une légende
2. Dans une Amérique au marché florissant, la concurrence explose !
3. L’Ouest Sauvage (WWW)
4. La guerre : l’exportation de la culture denim
5. Les années 50 : l’ère du changement
6. Les jeans dans les années 60-70 : la naissance d’un symbole de contestation
7. Le jean, l’icône des années 80-90
8. Le jean aujourd’hui
1. Strauss & Davis : la naissance d’une légende
Il est impossible de raconter l’histoire du jean sans parler de la marque Levi’s. Et son histoire commence avec deux hommes ! Le premier est un bavarois nommé Levi Strauss qui émigre aux États-Unis en 1853, à l’âge de 23 ans pour profiter du marché local florissant en période de ruée vers l’or. À l’époque, il possède une entreprise de tissu. Le second homme se nomme Jacob Davis, qui lui émigre de Riga, en Lettonie. En 1870, Davis a quant à lui une entreprise de filage à Renom, située dans le Nevada. On raconte qu’un jour, la femme d’un bûcheron local lui demanda de fabriquer un pantalon solide pour son mari dont la taille était peu commune. Ici, le but était de concevoir un pantalon qui durerait plus qu’une saison de travail. Pour ce faire, elle paya une avance de 3$, et il accepta. Pour concevoir ce pantalon solide, il travailla avec un rouleau de toile de coton acheté à Levi Strauss. La rencontre entre les deux hommes était faite et une légende était née !
Dans les faits, il se lance dans la création d’un pantalon ordinaire. Vient le moment où il porte son regard sur une multitude de rivets en cuivre qu’il a utilisé pour l’un de ses travaux précédents. Son idée est alors d’y avoir recours pour maintenir le tissu à certains points sensibles du pantalon, offrant alors au vêtement des vertus de solidité supplémentaires. S’il vend seulement quelques paires de jeans le premier été, il ne tarde pas à se faire connaître. En recherche d’un associé, Davis pense immédiatement à celui qui lui a vendu la matière première. Ainsi, il envoie une lettre à Levi Strauss en 1872. C’est précisément le 20 mai 1873 que l’on donne aux deux hommes le brevet associé à cette trouvaille : le 139,121 intitulé “improvement in Fastening Pocket-Openings“. Depuis, on considère cette date comme étant le début du jean puisqu’ils pérennisent l’entreprise pour des années, brevet oblige.
2. Dans une Amérique au marché florissant, la concurrence explose !
Si Levi Strauss et Jacob Davis ont jusqu’alors profité de leur brevet pour être en situation de monopole, ce dernier expire en 1890, permettant alors à d’autres marques déjà fabricantes de vêtements de travail de suivre le mouvement qu’ils ont initié. Ainsi, être un pionnier sur ce marché perd tout son sens. Certains concurrents ont un pouvoir financier bien plus supérieur, et d’autres, une expérience bien plus concéquente dans l’univers du denim. Suite à l’expansion du pays, la concurrence de fabricants de denim se développe en parallèle de la demande de vêtements de travail.
Parmi les entreprises rivales, l’une des plus importantes se nomme Eloesser-Heynemann, avec sa marque “Can’t Bust’Em” qui, installée à San Fransisco depuis 1851, est restée dans l’ombre de Levi’s jusqu’alors. À cette époque, la production de denim se limite à l’échelle locale, permettant alors à de multiples marques d’exister sur ce marché florissant. Aussi, la demande croissante de vêtements de travail encourage les nouvelles entreprises à se lancer. Certaines marques devenues aujourd’hui mythiques commence leur activité à cette époque : Hamilton Carhartt dans le Michigan en 1884, Henry-David Lee avec sa H.D Mercantile Company dans le Kansas en 1889, ou encore Blue Bell (futur Wrangler) en Caroline du Nord en 1904. Mais aussi d’autres entreprises dont les noms nous sont inconnus : OshKosh B’Gosh en 1895 dans le Wisconsin ou encore The Stronghold la même année en Californie.
Les années 1890 sont également marquées par l’arrivée de la première version du Levi’s 501. À cette période, Levi’s se fournit en denim chez la plus grande manufacture de l’époque : Amoskeag à Manchester, dans le New Hampshire. Il s’agit alors d’une toile de denim premium que la manufacture appelle XX et qui a des attributs de solidité supérieurs aux autres grâce à sa couture en double x. « XX » est donc le premier nom du 501, en quelque sorte son aïeul. S’en suivent l’apparition de nombreux éléments que l’on retrouve encore sur les jeans d’aujourd’hui. Si la surpiqure de teinte orange existe déjà depuis les tout premiers modèles de jeans, le patch en cuir à la ceinture (1896) ou encore la seconde poche arrière (1901) contribueront un peu plus à différencier les marques, une sorte d’avant-garde du marketing.
3. L’Ouest Sauvage (WWW)
Au fur et à mesure que le XXe siècle défile, les vêtements composés de denim commencent à se populariser au-delà des usines et ranchs. C’est alors que le jean rentre dans la garde-robe quotidienne des américains. Les mentalités évoluent en même temps que le pays se développe et s’industrialise. Les voies ferrées remplacent petit à petit les convois de charrettes et les cowboys raccrochent leurs éperons. Jouant sur la nostalgie des gens, l’industrie Hollywoodienne naissante commence à mettre à l’écran les premiers Westerns. Si le premier film date de 1904, ce n’est que durant les années 30 que ce type de film connaîtra sa gloire, incarné par John Wayne, son Colt, son Stetson et un jean poussiéreux. Les chaines de radio country contribuent également au phénomène.
Alors que le mythe du cowboy est en train de naître, beaucoup de marques orientent leur stratégie marketing dans ce sens. Ainsi, les premières cibles de cette communication sont avant tout les touristes qui commencent à affluer dans les ranch de l’Ouest Sauvage afin de vivre une vie de cowboy, avec comme signe distinctif principal : un jean. Entretemps les marques ont totalement incluent les innovations de Levi’s dans leurs créations et commençent à apporter leurs nouveautés propres en termes de coupe et de caractéristiques pour se démarquer à leur tour. Les passants de ceinture apparaissent en 1922, encore une fois chez Levi’s. Puis Lee introduit la braguette en 1925 sur ses jeans 101 dont la coupe est déjà plus large que la 501 de Levi’s. Ils sont renommés les 101Z. Aussi, la marque introduit son premier objet publicitaire avec la poupée “Buddy Lee” (1920), installée en vitrine d’un grand magasin de Mineapolis.
À cette époque, les trois grandes marques de denim se font la guerre ! Elles jouent non seulement la carte de la différenciation au niveau de leurs produits, mais également en ce qui concerne leur image. C’est dans ce contexte particulier qu’apparaît le fait de porter telle ou telle marque selon son mode de vie ou son origine sociale. En 1936, le fameux “Big E” fait son apparition ! Il s’agit de la fameuse étiquette rouge de Levi’s aujourd’hui connue sous le nom de “Red Tab“. Il est précédé du “Lady Levi’s” en 1935 : le premier jean pour femme sur lequel se penchera également Blue Bell dès 1940.
Les géants émergeants du jean débauchent des anciens cowboys (Levi’s sur la côte Ouest et Lee à l’Est) pour les utiliser comme consultants. En 1941, Lee fait appel à Thurkel Greenough, une star du rodéo de l’époque pour essayer d’améliorer ses jeans. La légende raconte que c’est sa femme qui lui a fabriqué un jean évasé au niveau des chevilles, à partir d’un modèle de chez Lee, afin qu’il soit adapté à la monte. On assite à la naissance du bootcut qui est aussitôt adopté par les américains !
4. La guerre : l’exportation de la culture denim
La guerre fait rage en Europe et le rationnement est un frein aux entreprises fabricantes de denim de l’époque, notamment en ce qui concerne le métal utilisé pour les rivets ou les boutons. Aussi, ce sont les femmes qui prennent le relais dans les usines, les hommes devant se préparer à la guerre. Elles commencent alors à porter le vêtement de travail… en denim. Peu d’années plus tard, soit en 1945, les premiers GI américains commencent à débarquer en Normandie habillés de jeans qui leur rappellent le pays, et qui nous font découvrir cette culture par la même occasion. Mais pas seulement, car le Japon se prend également à aimer cette nouvelle matière qu’arborent les soldats américains. Et notamment Mr Tsunemi, un passionné des premiers jours qui tient un surplus militaire U.S. à Nippori, dans la banlieue de Tokyo dès 1947. C’est d’ailleurs dans ces surplus que sont écoulés les stocks à l’étranger, vu qu’aucun jean n’y est encore fabriqué.
5. Les années 50 : l’ère du changement
Nous voilà quelques années après la fin de la Seconde Guerre mondiale ! Une anecdote de 1951 illustre bien le changement de statut du jean, passant du simple vêtement de travail à une pièce portée par des personnes du plus haut rang social. L’histoire commence quand Bing Crosby, qui est alors l’un des chanteurs américains les plus populaires, prend une chambre à l’hôtel Vancouver, au Canada. Plus tôt ce meme jour, Crosby est allé chasser avec un ami, et ils portaient encore les vêtements qu’ils avaient utilisés en arrivant à l’hôtel. Comme pour tout établissement respectable de l’époque, on leur refusa l’entrée à cause de leur tenue, jusqu’à ce qu’un membre du staff reconnaisse la star d’Hollywood. Rapidement, ce fait divers est repris dans les journaux. Instantanément, Levi’s perçoit l’opportunité marketing qui s’offre à elle et avec une pointe d’ironie, voire de provocation, propose à Bing Crosby de customiser sa propre veste de smocking en jean, comme un symbole de l’évolution du denim. La veste est portée la première fois par la “star” dans une fête à Elko, dans le Nevada où il est maire d’honneur (photo ci-dessous)
Dans les années 50, le jean fait partie intégrante de la vie quotidienne des femmes et des hommes. Si les femmes portent le 5 poches de couleur foncée, taille haute avec un chemisier et des mocassins plats, les hommes, quant à eux, portent le jean comme un véritable symbole de rebellion, avec un t-shirt blanc et un blouson de moto en cuir noir ! Et c’est notamment à cette époque que des icônes du cinéma comme James Dean et Marlon Brando le portent dans de nombreux films. Le jean commence à gagner en popularité !
6. Les jeans dans les années 60-70 : la naissance d’un symbole de contestation
Au début des années 60, le jean devient une pièce universelle portée par toutes les classes sociales et tous les âges. Et bien sûr, on porte notre 5 poches près du corps ! À cette époque, la coupe droite reste la plus populaire ! Et ça reste encore assez sage (preuve en image) !
Attention, l’arrivée du mouvement hippie et l’émergeance des sons de guitares acidulés dès la fin de la décennie vont faire évoluer la façon de porter le jean ! À cette période, on connaît également des mouvements de contestation forts des jeunes générations, notamment face à la Guerre du Vietnam et à tout ce qui en découle (naissance des militants pacifistes). Le jean se porte alors délavé voire déchiré, et bien souvent dans sa version bootcut ! Dans les années 70, le jean devient un symbole cool du mouvement hippie. Alors qu’il se porte dans les années 50 début 60 en coupe droite, il s’élargit avec des pattes d’éléphant, se customise avec des broderies, mais également des fleurs ! Porter un jean au début des années 70, c’est aussi soutenir la classe ouvrière. Pour les féministes et les activistes du mouvement de libération des femmes, on décide de porter des jeans pour exiger l’égalité des sexes !
7. Le jean, l’icône des années 80-90
À la fin des années 70, certains lycées décident d’interdire le port du 5 poches. Bien entendu, cette décision ne fait que renforcer son statut. Dans les années 80, le jean poursuit son ascension ! Ainsi, il devient la pièce phare de toutes les générations. Sa teinture se voit s’éclaircir : on parle alors de jeans rinsed, voire bleached. Ce type de délavage s’obtient de façon mécanique : le jean est délavé à l’aide de pierres encore des jets de sable (technique controversée, car dangereuse pour l’homme). Le Levi’s 501 taille haute et coupe droite fait fureur chez les femmes comme chez les hommes. On le choisit moulant et très près du corps, dans le but de mettre en valeur notre corps. En 1988, naît un nouveau type de délavage : le jean neige.
Dans les années 90, le jean est toujours autant apprécié ! Cette période est marquée d’un coté par les publicités controversées de Calvin Klein (Brooke Shields ou encore Kate Moss et Mark Wahlberg), et de l’autre, par l’explosion des marques très « mode » telles que Diesel, Miss Sixty ou encore Pepe Jeans. À partir de 1998, on constate le grand retour du jean brut !
8. Le jean aujourd’hui
Depuis, la popularité du jean n’a pas cessé de se développer, puisqu’il reste encore aujourd’hui une pièce phare du dressing masculin comme féminin. Au fil des des années, on découvre de nouvelles coupes plus près du corps, comme le slim ou encore le skinny. La mode étant cyclique, on revient désormais sur des coupes plus droites et des teintes rinsed ou bleached ! Le jean brut est quant à lui toujours aussi présent ! L’engouement pour les paires de jeans vintage est tel que beaucoup s’arrachent désormais des jeans Levi’s vintage made in USA des années 80-90. Si acheter un denim neuf ou d’occasion vous intéresse, on vous invite à lire notre guide sur le jean.
[Article rédigé en 2016 par Romano | MAJ par Gurvan en 2022]
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