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C’est l’histoire d’un shooting…

C’est l’histoire d’un shooting qui ne pouvait définitivement pas se dérouler comme les autres, l’histoire d’un shooting dont on aura quasiment tiré le fil jusqu’au bout, comme un athlète qui chute à quelques mètres de l’arrivée, le regard hagard, voyant la craie se dérober sous ses yeux et son monde s’écrouler. Plus de son, plus d’image. Silence. C’est ce que j’ai ressenti lorsque Fred, mon photographe, m’a annoncé la mort dans l’âme que son appareil photo l’avait lâché et que finalement il n’avait que 3 photos de notre séance. 3 photos. Seulement 3. Bien insuffisant pour vous proposer une série de qualité. Bien insuffisant pour vous présenter des heures de travail et tenter de vous immerger dans cet univers particulier que l’on avait créé.

Vous allez me dire que ce n’était qu’un shooting et que ça n’a rien de grave et vous avez raison. Les choses n’ont que la valeur que nous leur attribuons. C’est là que le bât blesse car chaque shooting demande un investissement considérable. Ça ne paraît pas grand chose et pourtant… Cela fait maintenant un an que nous proposons des looks et même si on avait senti que cela ne serait pas simple si on voulait que les choses soient bien faites, nous nous sommes rendus compte de l’importance du travail de préparation qui précède un shooting. Un travail qui porte ses fruits puisque nous avons eu énormément de retours positifs à ce propos et nous vous en remercions.

Pour revenir à ce dernier shooting, il nous a fallu un peu de temps pour nous remettre de cette désillusion mais avec Joe, nous nous sommes dits qu’il ne fallait pas que cette initiative se solde par un échec. On était d’accord. Il fallait qu’il ressorte quelque chose de positif de cette mésaventure, c’est pourquoi on a décidé d’utiliser ce shooting raté pour vous plonger dans les coulisses de la réalisation d’un article look. Un peu comme le documentaire Lost in la mancha nous fait revivre le tournage catastrophique de L’Homme qui tua Don Quichotte, film qui ne vit jamais le jour soit dit en passant.

La direction artistique

Comme pour tout ce que l’on entreprend sur Comme un camion, les shootings photos ce n’est pas notre métier de base. On apprend, on essaie, parfois on réussit, on se pose énormément de questions sur le comment des choses. On dépense beaucoup d’énergie, on gaffe (un peu), on se rattrape et on arrive finalement à produire quelque chose qui nous satisfait, pas seulement parce que c’est nous qui le faisons – d’ailleurs on est rarement “seul” – mais plutôt parce qu’on arrive à faire passer ce que l’on veut, à créer des ambiances, à vous emmener un peu dans chacun de nos univers.

Par exemple, pour ce shooting, l’idée était de réussir à mêler un style à la Gordon Gekko, Wall Street Journal sous le bras et une ambiance brunch suédois dans le Marais. Comment ça se passe concrètement ? J’envoie des photos de styles, d’ambiances, des passages de films à mon photographe et on discute ensemble des lieux où l’on pourrait obtenir une atmosphère qui correspond à cet esprit. On se met d’accord sur la logistique et Fred choisit son matériel en fonction de l’ambiance qu’on veut donner.

Ça, c’est pour la direction artistique. Ensuite, il faut constituer le look en lui même.

La tenue

Pour cela, on puise dans nos influences, on fouille, on ressort une pièce d’un lookbook qu’on nous a envoyé. Pour ce shooting, je voulais absolument avoir un trench Burberry. Une vieille obsession, j’en parle depuis des lustres. N’ayant pas l’équivalent d’un smic à dépenser dans un trench, j’ai contacté le service presse de Burberry. Il a fallu une bonne dizaine de mails pour que finalement Burberry accepte de me prêter un trench.

C’est bien gentil d’avoir un trench, mais ça ne suffit absolument pas à constituer un look entier. il fallait donc que je complète la tenue. Des chaussures en cuir marron feront parfaitement l’affaire. Agnès b. m’a prêté une paire de sa nouvelle collection. Pour le reste j’ai complété avec des affaires à moi : pantalon Sandro, pull Muji à col rond, ceinture H&M, chemise blanche à col court, cravate All Saints, foulard Ben & Fakto et la dernière édition du Wall street Journal comme accessoire.

J’avais réussi à constituer un look qui correspondait à l’esprit que je souhaitais donner à ce shooting. Le financier en week-end pouvait tranquillement aller bruncher.

Le shooting

Il ne restait plus qu’à “shooter”. C’est à ce moment là qu’on s’est dit que cela allait vraiment être compliqué. Vous n’avez pas pu passer à côté, il a fait froid au début du mois de février, très froid. -12°C précisément lorsqu’on s’est décidé à aller affronter les éléments. Nous n’avons pas été déçu. Contrairement à des shootings de grands magazines nous n’avons pas la chance d’avoir une tripotée d’assistants dont le rôle se limite à porter un parapluie ou un chauffage portatif. Non, malheureusement. On a du se débrouiller seuls. Et le trench, je peux vous assurer que ça ne vaut en rien une doudoune de montagnard doublée en plume d’oie du grand nord.

Nous avons suivi le chemin que nous nous étions fixés profitant des spots que nous avions identifiés. Le trench était un peu trop grand, je n’ai pas le mètre 85 qui me permet de rentrer dans des fringues destinées aux mannequins professionnels. On peut difficilement choisir sa taille lorsqu’une grande maison nous prête des pièces, c’est dommage. C’est aussi pour cela que les mannequins sont morphologiquement identiques. Nous avons du ruser pour que cela ne se voit pas trop, nous avions plutôt réussi. Enfin, on ne le saura jamais.

Le lundi suivant, je suis allé rendre les fringues qu’on nous avait gentiment prêtées, c’est à dire le trench et les chaussures. C’est en sortant de chez Agnes b. que j’ai reçu le mail de Fred m’annonçant que finalement, le shooting venait de s’évaporer. Pschitt… 3 photos seulement, une goutte d’eau dans le désert. En général, on fait une sélection parmi une quarantaine de clichés à l’issue du shooting.

Vivement le prochain

Ça a quelque chose de poétique de se dire que ces photos sont restées coincées derrière le miroir cassé d’un appareil argentique, qu’elles existent sans exister, comme-ci elles étaient suspendues à un fil que l’on est à deux doigts de toucher. Les photos ne servent généralement qu’à raviver des souvenirs. Dans ce cas, ce sera l’inverse, nos souvenirs tenteront en vain de révéler un moment qui n’a pas voulu être capté, immortalisé.

Les conditions climatiques du shooting avaient quelque chose d’irréel. Le fond de l’air était glacial mais la luminosité était elle extremement forte, blanche. A tel point que Fred m’a dit deux trois fois “Merde, les ombres sont super fortes, on ne voit que ça.” En effet, ce shooting restera une ombre au tableau, une ombre qu’on n’a jamais réussie à attraper, qui a jouée avec nous, qui s’est défilée. Bien trop forte en somme…

Les photos qui illustrent cet article sont les 3 seules photos que l’appareil de Fred a bien voulu nous donner.

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